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Ça ne me dérange pas qu’ils soient homos, mais ils le font salement : L’espace public de la sexualité entre hommes

Publié le 24 avril 2007 Mis à jour le 21 septembre 2023

24 avril

Laurent Gaissad
(CIRUS – Université de Toulouse le Mirail/ULB)

Résumé

Le cantonnement des activités homosexuelles à des espaces clos, tarifés et fortement ségrégués, n’est pas sans susciter un sentiment nostalgique chez ceux qui regrettent, pour en avoir fait l’expérience au cours des décennies précédentes – notamment dans les années 1970 - la mixité de classe, d’âge ou de culture des échanges sexuels entre hommes à même la rue des grandes métropoles. La virtualité des contacts standardisés rendus possibles par le développement d’Internet serait dès lors pour certains amplement responsable de la mort de la ville telle que nous la connaissons, et plus particulièrement, des formes de sexualité secrètes marquées par la diversité urbaine.

L’articulation suggérée par Simmel au tout début du 20ème siècle entre publicité et secret dans le développement de la vie moderne continue ainsi incontestablement à faire débat, surtout si les conduites sont rendues acceptables sous contrat tout en se perpétuant, bon an mal an, dans la rue ou à partir du cyberespace.

La drague sexuelle entre hommes dans l’espace public contredit à cet égard les a priori éducatifs et savants contemporains développées à cette période de gestion des marges et des risques : précarité des lieux et des moments, acteurs sociaux « défaillants » exposés à toujours plus de vulnérabilité, carence d’enjeu hors paradigme identitaire et épidémiologique. Son ethnographie déconstruit tant l’approche nord-américaine en terme d’instabilité psychologique que l’idée française d’un « détournement » de l’espace public en marge d’une citoyenneté gaie idéale. Elle dit plutôt ses ajustements aux voisinages multiples et aux rappels à l’ordre : politiques d’aménagement, morale homosexuelle au temps du sida, sanctions pour la contenir en des quartiers tolérés ou en deçà de ses frontières nocturnes.

Bio/Bibliographie

Docteur en Sociologie et Sciences Sociales (Université de Toulouse le Mirail, 2006), sa thèse réalisée avec le soutien de l’Agence Nationale de Recherches sur le Sida (ANRS / CNRS) sur la sexualité masculine dans les espaces publics souligne les limites des paradigmes identitaires et épidémiologiques en vigueur. Chercheur associé au Centre Interdisciplinaire de Recherches Urbaines et Sociologiques à Toulouse, il participe actuellement au projet « Genre, Normes et Sexualités » en histoire comparée des pratiques occidentales au 19-20ème siècle dans le cadre d’une bourse FNRS à l’Université Libre de Bruxelles.

Publications récentes 

  • « L’air de la nuit rend libre ? Lieux et rencontres dans quelques villes du sud de la France », Les Annales de la Recherche Urbaine, 87, Sep. 2000.
  • « Du sexe sans conséquence : le bon endroit et le bon moment », Sexe, Espaces et Corps. De la catégorisation du genre, Editions Universitaires du Sud, Toulouse, 2000.
  • « Lieux de drague sous observation : vers une écologie des risques ? », Transcriptase, VIH et virus des hépatites, n° 97, Dec. 2001.
  • « La lutte des places, ou quand la rue se déplace : éthique du trottoir, commerce du sexe et clandestinités recomposées », La rue, Presses Universitaires du Mirail, Toulouse, 2005.
  • « From nightlife conventions to daytime hidden agendas: dynamics of urban sexual territories in the south of France », Journal of Sex Research, 42:1, Feb. 2005.