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  5. 2016

Blackness and The End of the Closet : Repenser l’homosexualité en Afrique sub-saharienne au 21e siècle

Publié le 3 mai 2016 Mis à jour le 22 septembre 2023

3 mai

Avec le Festival Massimadi

Frieda Ekotto
(University of Michigan)

Salle Doucy (12e étage), Institut de Sociologie (15e étage), Bâtiment S
Avenue Jeanne, 44, 1050 Bruxelles


Abstract
« L’homosexualité est bonne à penser » est une formule du philosophe Camerounais Fabien Eboussi Boulaga. La pensée est un outil — et bien plus encore —, c'est le compagnon de la destinée humaine. On mesure son importance lorsque le temps a fait son œuvre. C'est pour cela que les ouvrages de Franz Fanon nous touchent tant. Bien entendu, l'Histoire les traverse. Mais qui le nierait ? Nous sommes le produit de l'Histoire. Oui, « l'homosexualité est bonne à penser ». Si la formule d'Eboussi Boulaga séduit tant, c'est qu'elle est en partie une citation des Evangiles. Il procède à la manière de Saint Augustin ou de James Baldwin : toutes ses phrases sont des citations cachées. Ce jésuite dit aux yeux de tous que l'homosexualité n'a rien de répréhensible au jugement des Evangiles. Dans la Genèse, à chaque acte créateur, revient le refrain : « Dieu vit que c'était bien ». Dans ce « bien » est comprise aussi la sexualité sous toutes ses formes. Et le reste est le moralisme, il appartient aux évangélistes et aux bien-pensants.
Dans cette conférence, il s’agit surtout de repenser la question de l’homosexualité dans le continent et les communautés de sa diaspora. J’utilise le mot ‘Blackness’ pour couvrir l’Afrique sub-saharienne et les communautés de sa diaspora. Comment enrayer l’homophobie en Afrique ? Comment l’extirper de nos mentalités ? Comment nous convaincre que l’homosexualité n’est pas une maladie contre laquelle les Africain (e)s sont naturellement vaccines ? Comment nous sortir du fantasme meurtrier qu’un Africain ne saurait être homosexuel ? C’est en assenant ce genre de lieux communs qu’on justifie les discours de haine. Un amalgame plus ou moins savant est entretenu entre l’essence de l’Africain et son devenir homosexuel. On en est arrivé a dresser l’identité contre la contingence, comme si la première était réputée immuable et la seconde changeante. Si la coupure s’opérait de la sorte, il nous serait impossible de définir notre africanité. Que dire de la situation singulière des femmes qui aiment d'autres femmes doublement minorisées, invisibilisées, parce que soumises de même au dictat phallocratique du pouvoir patriarcal ?

Biographie
Frieda Ekotto est professeure et chef du département des études afro- américaines et africaines à l’Université´ de Michigan à Ann Arbor (Etats-Unis). Elle enseigne aussi au département de littératures comparées, et celui des littératures francophones et françaises. Elle a publié de nombreux ouvrages : L’écriture carcérale et le discours juridique chez Jean Genet (essai); Chuchote pas trop (roman) et Portrait d’une jeune artiste de Bona Mbella (roman.) Ses travaux portent sur la littérature, le droit et la question de l’autre dans le cinéma africain d’expression française. Son récent ouvrage What Color is Black ? Race and Sex across the French Atlantic (Lexington Press, 2011), se concentre sur la question raciale et la philosophie de l’invention Negri. Actuellement, elle travaille sur un livre théorique sur les femmes qui aiment les femmes en Afrique sub-saharienne.